Opposition au mariage : une sommation respectueuse…

L’opposition au mariage, chose qui n’existe plus de nos jours… Voici un exemple dans la Nièvre, et pourtant ce n’est pas aussi vieux que cela…

La plupart du temps, les actes de mariage anciens stipulent qu’ils ont été célébrés « sans aucun empêchement ni opposition ». Il y est également fait mention de la présence et du consentement des parents des mariés, même lorsque ceux-ci sont depuis longtemps majeurs.

opposition_au_mariage.jpgEn effet, autrefois, il existait une majorité matrimoniale, nécessaire pour convoler sans le consentement des parents ou tuteurs, parfois différente de la majorité civile.
Les deux majorités ont été variables au cours du temps.
Par exemple, entre l’an 12 et 1907, la majorité matrimoniale était de 25 ans pour les garçons, 21 ans pour les filles, la majorité civile étant fixée à 21 ans pour les deux.

Si au moins l’un des parents n’autorisait pas le mariage, les mariés devaient attendre la majorité matrimoniale.
Au-delà, les futurs devaient faire part de leur projet par un acte respectueux, ou sommation respectueuse. L’acte devait être notifié aux parents récalcitrants par deux notaires, ou un seul notaire assisté de deux témoins. Si les parents refusaient toujours de consentir à l’union, il devait être renouvelé deux fois, les deux mois suivants.
Lorsque le garçon avait plus de 30 ans, ou la fille plus de 25, une seule notification était nécessaire.
Enfin, un mois après la dernière notification, dans tous les cas, le mariage pouvait avoir lieu.

Un exemple à Poiseux :
Louis Antoine Engrand, employé aux forges royales de Guérigny, âgé de 39 ans, orphelin de père, désire épouser Célestine Pillet, 17 ans, fille d’huissier. Les parents de la jeune fille donnent leur consentement au mariage, mais Sophie Ronsin, mère de Louis Antoine, s’y oppose. Le 21 juillet 1841, il fait donc une « Sommation respectueuse à Madame sa mère » :

« Pardevant Me Claude Didier Usquin notaire royal à la Résidence de Guérigny y demeurant Canton de Pougues, arrondissement de Nevers, Département de la Nièvre, en la présence des sieurs Pierre Buzelin ainé marchand et Jean baptiste Blondelet l’un des gardiens des forges royales demeurant en cette dite commune de Guérigny tous deux témoins pour ce exprès requis et soussignés. L’an mil huit cent quarante un, le vingt unième jour du mois de Juillet à onze heures du matin, Est comparu en l’Étude de nous dit notaire, Mr Louis Antoine Engrand commis de première classe des forges Royales de la Chaussade, demeurant en cette commune de Guérigny, né à Aire, département du Pas de Calais le Quatorze Avril mil huit cent deux, de defunt Sieur Louis Joseph Engrand, vivant employé aux dites forges Royales et de Dame Sophie Ronsin ses père et mère cette dernière demeurante avec lui comparant. Lequel a dit que depuis longtemps il recherche la main de Demoiselle Célestine Pillet agée de dix huit ans, fille du sieur François Pillet huissier près le tribunal Civil de première instance séant à Nevers, et de Dame Célestine Clémendot ses père et mère demeurant en la commune de Poizeux, mais que malgré ses sollicitations et Prières la dite Dame Ronsin sa mère se refuse de donner son agrément à ce Mariage sans vouloir s’expliquer sur les motifs de ce refus Pourquoi le dit comparant nous à requis de Nous transporter en son nom, ainsi que les dits témoins auprès de la dite Dame sa mère à l’effet de lui notifier la prière respectueuse, qu’il lui réitère par ces présentes de vouloir bien lui accorder son consentement au Mariage dont il s’agit, et a le dit comparant, après lecture faite ici signé avec nous notaire et témoins. Ainsi signé à la Minute Engrand, Buzelin, Blondelet et Usquin notaire soussigné Usquin notaire A quoi obtempérant, nous notaire susdit accompagné des dits témoins soussignés nous sommes transportés de suite au domicile du dit sieur requérant qui est celui de la Dame sa mère, puisqu’elle réside chez lui et avec lui, où étant nous avons trouvé la Demoiselle Sophie Engrand soeur du requérant à la quelle nous avons donné lecture présence des dits témoins, de la requisition du sieur Louis Antoine Engrand son frère, tendant à demander par notre Ministère, l’agrement de la dame sa mère pour le Mariage projeté entre lui et la demoiselle Pillet, dénommée et domiciliée, en la réquisition de l’autre part, a quoi la dite demoiselle Sophie Engrand à repondu que sa mère ne consentirait jamais au mariage de son frère avec la Demoiselle dont il s’agit. Sur quoi nous notaire susdit avons fait diverses observations à la dite Demoiselle Engrand tendantes à engager la dame sa mère à donner purement et simplement son consentement et de la prévenir et même de lui remettre la copie de la présente sommation respectueuse que nous avons collationnée sur la présente minute. De tout quoi nous avons, présence des dits témoins soussignés, fait et rédigé le présent procès verbal, duquel, comme il est deja dit, copie collationnée a été remise à la dite demoiselle Engrand, à l’heure de une après midi signée de nous et d’iceux témoins la quelle sur la sommation à elle faite de signer, à déclaré ne le vouloir de ce enquis et interpellé le tout après nouvelle lecture entière faite. La Minute est signée Buzelin, Blondelet et Usquin notaire soussigné. En marge est écrit : Enregistré à Nevers le Vingt Quatre Juillet mil huit cent quarante un, folio Quatre vingt Quinze recto Case huit, reçu un franc dix centimes dixième compris signe Vimal receveur Usquin notaire. »

Le 11 septembre 1841, à Poiseux, Antoine Louis Joseph Engrand épouse Célestine Virginie Pillet. La mère du marié, Sophie Louise Ronsin n’est pas présente, pas plus que sa soeur.
Le futur marié produit l’expédition de l’acte respectueux adressé à sa mère, qui restera annexé au registre des mariages.

Quelques précisions sur ce site : Opposition au mariage

crédit image : Mon livre favori : « amoureuses catherinettes » par Max DERVIOUX de 1938

 

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

 Powered by Brin de Feuille